La fin du plus grand des Caïds

L’histoire commence au 17ème siècle, bien avant la bande à Bader et avant la bande à Bonnot. Des paysans locaux découvrent une drogue nouvelle et ensorceleuse. Ils l’essayent, la trouvent bonne et en deviennent accros. Leurs voisins les imitent, les étrangers de passage les copient et exportent petit à petit cette drogue. Celle-ci va alors se répandre dans le monde entier comme une trainée de poudre. Les petits profiteurs-négociants-dealers apparaissent et commercialisent cette drogue. Très rapidement le commerce se développe, s’intensifie et s’étend dans tous les milieux. La drogue tue mais qu’importe ! Les profits sont immenses. Le grand banditisme s’installe. Alors surgissent les vrais caïds, ces rois de la pègre qui vont monopoliser le commerce de cette drogue et en gérer les profits colossaux. Ils achètent d’abord les nations puis les Etats : Tous : pas un ne résiste ! Puis viennent les juges, cela fut facile. La drogue était alors devenue légale. A ce moment là, son commerce explosa. Pourtant les drogués après plusieurs années de consommation mourraient souvent dans des conditions effroyables. Ils étaient aussitôt remplacés par de jeunes consommateurs encore plus affamés de cette drogue devenue légale et célébrée dans tous les magazines, vantée dans les films et portée au pinacle par tous les champions de la liberté ! Les caïds de la drogue tenaient tout : les médias, les scientifiques, les politiques, les enseignants… et les autres.

Par séduction, ils avaient aussi réussi à persuader que l’usage de la drogue était bon, bien et bénéfique. Par corruption, ils étaient parvenus à exercer une influence pernicieuse et mortelle sur les populations entières alors qu’ils savaient que la drogue qu’ils commercialisaient était dangereuse, et une fois sur deux mortelle !

Big BobagoLe roi des caïds, Big Bobago, siégeait aux Etats Unis. Il avait fait installer dans le hall de son siège social un planisphère de 15mx4m représentant les deux hémisphères terrestres. Chaque Etat était représenté par son drapeau et un compteur totalisant en direct le nombre d’unités de drogues vendues dans cet état. Un compteur plus important totalisait le chiffre de ventes par continent. Au milieu de l’Océan Atlantique un gros compteur-totalisateur affichait en continu et en live le total des ventes mondiales. Le visiteur ébahi ne pouvait lire, ni le chiffre des unités, ni celui des dizaines, ni celui des centaines tellement il tournait vite. Tous demeuraient éberlués et éblouis tant ils avaient peine à croire réel ce qu’ils voyaient.

Passez la monnaie, passez la monnaie et ça tournait… Big bobago tenait tout. Les concurrents étaient nombreux mais dès qu’ils apparaissaient, ils étaient aussitôt éliminés en trois étapes parfaitement codifiées :

  1. D’abord une explication-avertissement oral assorti ou non de menaces selon l’interlocuteur
  2. Section physique des deux tendons d’Achille de celui qui n’avait pas compris
  3. Elimination de l’opposant-concurrent-récalcitrant soit physique par des sicaires appointés largement, soit légale avec des juges appropriés toujours bienveillants pour les criminels mafieux. Et cela fonctionnait à la perfection.

C’est ainsi que tous les opposants de Big Bobago furent éliminés. Des professionnels de santé qui s’étaient rendus compte que cette drogue tuait, furent écartés et étouffés financièrement. Des associations telles que « Droit des non drogués » étaient mises à l’écart par décisions de justice. Des ligues qui s’étaient constituées pour réclamer aux tueurs de Big Bobago de payer leurs crimes et de réparer les dommages qu’ils causaient, furent interdites de médias et asphyxiées.Pourtant la vigilance des séides de cette drogue, aveuglément dévoués à Big Bobago fut trompée par un chinois voisin des Triades de Hong Kong. Celui-ci découvrit dans son officine une nouvelle drogue, une e-drogue, électronique et non mortelle. Il réussit à infiltrer par les mêmes méthodes le marché mondial. Il put ainsi vaincre à l’étouffée celui qui avait trompé et tué des milliers d’humains.Sa drogue électronique supplanta celle de Big Bobago. Celui-ci devenu vieux affaibli fut éliminé par l’électronique. Le commerce de la drogue suit le commerce mondial, il suit la mode. Big Bobago le savait. Il avait créé la mode. Il en avait organisé le marché. Il en avait centralisé les profits. Il avait pris conscience de ses crimes. Il était usé. Ses derniers mots furent : « Il y a un temps pour brûler ce qu’on a adoré et un temps pour adorer ce qu’on a brûlé ».

Toxicologue Docteur en Médecine, en Pharmacie, Ingénieur des Sciences Président de Tabac & Liberté, Toulouse, France

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